Le
problème, c’est que la Ville s’est tellement imposé de contraintes que cet exercice
n’a plus de sens. Par exemple, le fait qu’on doive compter un minimum de trois
conseillers dans un conseil d’arrondissement fait en sorte qu’il est impossible
de retrancher un conseiller municipal dans les arrondissements de Brompton et
de Lennoxville, à moins de fusionner ceux-ci avec d’autres ou d’enlever tous
les arrondissements. Cependant, la Ville s’est donné comme obligation, avant
même le début des travaux, de conserver les arrondissements et leur territoire.
C’est pourquoi la réduction du nombre d’élus ne pouvait provenir que des grands
arrondissements.
Là
où le bât blesse, c’est que dans les arrondissements populeux, les élus
desservent déjà beaucoup plus de citoyens que dans les petits. Avec les
changements proposés, le manque d’équité sera encore plus grand. Dans
l’arrondissement de Lennoxville, trois élus représenteront 5 350 citoyens,
soit moins de 1 800 personnes par élu. Un conseiller de Fleurimont, pour
sa part, devra rendre des comptes à 10 400 citoyens. On peut comprendre
dès lors qu’il sera toujours relativement plus facile pour les élus des petits
arrondissements de mobiliser leurs citoyens pour influencer les décisions du
conseil municipal. Il faut aussi noter que les budgets de recherche et
secrétariat accentuent le phénomène. À
l’heure actuelle, 4 $ par citoyen peuvent être dépensés à Brompton à ce
chapitre, contre 0,90 $ par citoyen à Rock Forest-Saint-Élie-Deauville.
Espérons que la Ville saura convaincre Québec de modifier la loi quant à
l’allocation de ces budgets. Une question se pose toujours: veut-on réellement
accentuer le déficit démocratique actuel pour économiser 250 000 $?
Les
Sherbrookois de l’ancienne ville de Sherbrooke ont déjà beaucoup donné à la
cause de la fusion municipale. Les baisses de taxes qu’on nous avait promises (200
$ par an) se sont envolées quand le conseil municipal a décidé, sans consulter
les citoyens, de donner Hydro-Sherbrooke à la nouvelle ville. Il nous a aussi fallu partager nos services
avec plus de gens, ce qui amène rarement une meilleure qualité de ceux-ci :
diminution du nombre de collectes de déchets,
reconfiguration des circuits pour le transport en commun, état de nos
routes, etc. Il a fallu attendre plusieurs années avant que tous les citoyens
du nouveau Sherbrooke paient le même niveau de taxes que nous (il semblerait
même que pour la taxe d’affaires, l’harmonisation ne soit pas encore terminée).
Dix ans plus tard, on vient nous en demander encore un peu plus par rapport aux petits
arrondissements.
Le
brouillard, pour sa part, provient de l’évaluation trop générale des économies
reliées à l’exercice, en tenant compte des autres volets touchant les
propositions du Comité. Par exemple, on nous dit que le travail des élus et des
directeurs d’arrondissement sera facilité par l’implantation du 311, un service
de gestion des plaintes. Cependant, on ne mentionne pas dans le rapport que ce
service risque d’avoir des coûts récurrents avoisinant 600 000 $, sans compter les frais
d’implantation qui seraient du même ordre (évaluation basée sur les coûts à
Gatineau). N’oublions pas que couper quatre élus sauvera 250 000 $ par an.
De
même, on nous dit que la centralisation facilitera la vente de l’ancien poste
de police sur la rue Marquette. Pourtant, la centralisation mènera à l’abolition
de moins de 20 postes de fonctionnaires, soit trois par arrondissement en moyenne. Est-ce
que la libération d’aussi peu d’espace fera une différence dans le choix de
vendre ou conserver un immeuble aussi grand que l’ancien poste de police? On
peut en douter.
Enfin,
on va transformer des postes de généralistes en loisirs en postes de
spécialistes et on ne semble pas comptabiliser de futures (et fort probables) hausses
de salaire. Idem pour les directeurs d’arrondissement qui devront gérer deux
arrondissements au lieu d’un seul. Aussi, toute la réorganisation va faire en
sorte que plus d’employés municipaux auront à se déplacer de leur bureau vers
les divers bureaux d’arrondissements, mais on omet de présenter l’impact sur
les frais de déplacement (temps et kilométrage). Le brouillard s’épaissit.
En
conclusion, oui à la réduction du nombre d’élus, mais quand on se décidera à
revoir les territoires ou l’existence des arrondissements. Là, on pourra même se
permettre de descendre à un nombre encore moindre, sans craindre que certains
citoyens aient un poids politique moins important que les autres. Oui également à une réorganisation des
services, mais que la Ville nous présente des scénarios plus étoffés que celui
sur la table afin que nous puissions nous prononcer sur la base de données plus
près de la réalité.
P.S. Cette lettre a été envoyée à La Tribune pour publication il y a une semaine environ. Elle n'a cependant pas été publiée.
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