vendredi 22 avril 2011

Veut-on des gâteries ou répondre à nos besoins de base ?

Les citoyens de Sherbrooke ont appris par le truchement de La Tribune du 19 avril que la ville de Sherbrooke avait gratté ses fonds de tiroir et trouvé 370 000 $ pour refaire une petite portion (650 mètres) du boulevard Queen-Victoria. Selon les élus, et je les crois, la chaussée de cette route souffre d’une dégradation très avancée, qui représente des risques pour la sécurité des usagers.

Suite à cette intervention, il restera encore 3 km de cette route à rénover à court terme.  Si l’on y va au prorata, on peut supposer qu’environ deux millions de dollars seront requis pour rénover en entier le boulevard Queen-Victoria.

Dès le lendemain de cette annonce, le maire inaugurait l’illumination du pont Montcalm, au coût de 450 000 $, et présentait ce projet comme étant «la cerise sur le sundae ». Une gâterie, donc.

Je n’ai pu m’empêcher de penser que, plutôt que d’éclairer le pont, la ville aurait peut-être dû rénover dès cette année une plus grande portion du boulevard Queen-Victoria, une nécessité.

Quand l’argent est rare, il faut faire des choix. Pour ma part, j’aurais privilégié la réfection de la route parce que je suis tannée de me promener sur des chaussées en piteux état, qui mettent à rude épreuve la mécanique de mon auto et de mon vélo. Et parce que la sécurité des citoyens est pour moi plus importante que les quelques minutes passées à regarder un pont changer de couleurs.

J’espère que les citoyens qui s’extasieront devant les lumières du pont se rappelleront qu’en contrepartie, ils devront rouler plus longtemps sur des routes en mauvais état et non sécuritaires.

mardi 19 avril 2011

Impliquez-vous qu'ils disaient

Il est souvent dit dans les média que les citoyens ne s'impliquent pas suffisamment en politique. De plus, pour encourager la participation des citoyens, les politiciens présentent leur organisation comme prête à consulter les citoyens, à faire preuve de transparence.

Voici un cas pratique d'implication citoyenne et de la réception de l'appareil municipal face à cette participation citoyenne.

Dans notre secteur, nous avons choisi de nous opposer au règlement sur le logement complémentaire. Pas parce que nous voulions empêcher qui que se soit de garder ses parents âgés, puisque les gens qui veulent héberger leurs parents peuvent le faire avec le zonage existant, sans aucun besoin du règlement sur le logement complémentaire. D'ailleurs quand nous avons demandé aux urbanistes de nous dire ce que le règlement sur le logement complémentaire permettait de faire que le zonage actuel ne permettait pas, ils furent dans l'incapacité de nous répondre. Hier encore au Conseil municipal, M. Bouliane, en charge de la division de l'urbanisme, n'a pas été en mesure de présenter une réponse claire. Il a parlé d'encadrement, de normes, etc. Bref, il a patiné.

Dans notre démarche, nous avons demandé à la ville pourquoi elle entreprenait de tels changements étant donné l'inutilité de ce nouveau règlement. Après plusieurs détours, l'argument clé de la ville résidait dans le fait que la VADA appuyait la co-habitation entre les générations. Nous avons alors commencé notre recherche sur VADA, qui est un comité appelé Ville amie des aînés. Comme très peu d'informations existe sur ce comité, je suis allée au conseil municipal le 4 avril dernier pour demander aux élus certaines informations et soulever des points qui demandaient plus amples explications.

Voici le contenu de ma présentation à la ville :

"Je suis ici ce soir pour demander des informations sur le comité VADA, «Ville amie des aînés ».

Pourquoi parler de VADA ? Parce que c’est maintenant le nouvel argument que la Ville de Sherbrooke utilise pour justifier l’introduction du règlement 648 sur le logement complémentaire. Ce dossier n’est bien entendu pas encore clos pour la zone dans laquelle j’habite.

Quand la ville a commencé à parler de ce dossier, elle en justifiait l’introduction par la forte demande des citoyens pour les habitations intergénérationnelles. Lors de l’assemblée de consultation à Fleurimont le 24 janvier dernier, on nous a dit que cette forte demande s’établissait à 120 demandes sur les cinq dernières années pour l’ensemble de la Ville. Cela ne représente donc pas plus de 24 demandes d’information par année ou encore seulement 4 demandes par année, par arrondissement.

À entendre la réaction des gens dans la salle ce soir-là, j’imagine que les responsables de l’urbanisme se sont rendus compte que cet argument était des plus faibles.

Ainsi, lors de l’assemblée d’information du 22 mars qui a précédé l’ouverture des registres, où seulement une dizaine de citoyens se sont présentés, c’est la demande de la VADA qui était mise en évidence pour justifier l’introduction du règlement sur le logement complémentaire. C’est également cet argument que Mme L’Espérance a mis de l’avant lors d’une entrevue donnée à Radio-Canada suite à l’application du règlement 648 à la plupart des zones de la ville de Sherbrooke à la mi-mars.

Le seul document sur lequel j’ai pu mettre la main est une lettre très générale qui dit que la VADA  a fait des consultations par le passé (en 2009 ?) qui « soulignaient les bénéfices du caractère intergénérationnel des infrastructures de logement, ainsi que l’importance pratique et émotionnelle pour les aînés du maintien à domicile ».  Pour ma part, cet énoncé est beaucoup trop large et vague pour constituer un argument de poids qui prouve que l’introduction du règlement 648 fera une différence majeure à cet égard, comparativement à la situation actuelle, et qu’en conséquence, on soit justifié de l’imposer à tous les citoyens.

J’ai également découvert dans mes recherches que c’est la conseillère Mme Fugère qui est la présidente de ce comité. À deux reprises, cependant – lors de la consultation de janvier et lors de l’assemblée municipale du 14 mars - Mme Fugère a déclaré son intérêt dans ce dossier. Je ne sais pas trop à quoi elle voulait faire référence précisément dans le cas qui nous occupe. Cependant, réalisez-vous M. le Président que l’argument de poids de la ville repose sur un rapport émis par un comité dont la présidente, en l’occurrence Mme Fugère, a déclaré un intérêt personnel ?

Mes recherches ne m’ont pas permis de trouver certaines informations sur la VADA. Celles-ci m’apparaissent cependant nécessaires pour mieux comprendre le rôle de la VADA dans le dossier. C’est pourquoi, M. le président, que je vous demande ce soir de me fournir l’information suivante sur ce comité :

-         La liste des membres du comité VADA
-         La date de la réunion de la VADA où ce sujet a été débattu
-         Le nom de la personne qui a fait inscrire ce sujet (règlement 648) à l’ordre du jour
-         La copie du procès-verbal de cette réunion
-         La copie du mémoire déposé par la VADA sur le règlement 648 tel qu’annoncé lors de l’assemblée de consultation de janvier dernier

Le comportement de la VADA me surprend également à un autre égard.  En effet, la VADA devait bien savoir que même en l’absence du règlement 648, il était déjà possible pour les propriétaires de maisons unifamiliales isolées d’héberger leurs parents vieillissant, même en agrandissant leur maison, même en leur faisant un coin plus privé à l’intérieur de la maison, coin qui pouvait comprendre une cuisine et une salle de bain. La seule différence consistait à ne pas mentionner les mots « logements intergénérationnels » lors de la demande du permis de construction auprès de la Ville. Si la VADA ne savait pas cela, je me demande qu’elle crédibilité il lui reste pour remplir sa mission. Si elle le savait, on peut penser qu’elle s’est servie de sa notoriété pour défendre des intérêts autres que ceux des aînés et pour induire la population en erreur quant à la nécessité d’introduire le règlement 648. Dans un cas comme dans l’autre, ce n’est pas très reluisant, mais c’est très questionnable.

J’ose espérer, mesdames et messieurs les conseillers, que devant les deux zones d’ombre que j’ai mentionnées ce soir, que vous vous questionnerez à ce sujet, tenterez de faire la lumière et corrigerez toute situation irrégulière s’il y a lieu.

Enfin,  contrairement à la VADA, qui étudie les dossiers seulement sous l’angle des intérêts des personnes âgées, les conseillers municipaux se doivent de prendre en compte et d’arbitrer l’intérêt de l’ensemble des groupes de citoyens.

Les signatures récoltées lors de l’ouverture des registres le 23 mars dernier démontrent clairement qu’il y a au moins un important groupe de citoyens à Sherbrooke qui dit à la Ville qu’il est important pour eux que les quartiers de maisons unifamiliales isolées survivent dans leur forme actuelle. Espérons que la ville saura respecter ce besoin.

Si j’avais un conseil à donner aux conseillers municipaux ce soir, ce serait de refuser d’aller en référendum sur le règlement 648. De plus, je leur suggérerais de reconsidérer l’application du règlement à l’ensemble des autres quartiers de la ville. Nos recherches ont démontrées que ce règlement était totalement inutile si le but poursuivi était de permettre aux gens d’héberger des parents vieillissant.  Tout ce que ce règlement fera, c’est d’engendrer des dépenses supplémentaires à la ville pour sa gestion et son contrôle.  Il ouvrira aussi plus facilement la porte aux abus et ce sont les citoyens qui en feront les frais. Si vous ne revenez pas en arrière par rapport à l’application de ce règlement, les citoyens lésés par ce règlement auront de bonnes raisons de blâmer leur conseiller municipal.

Merci de votre attention et M. le président, j’espère que vous pourrez me fournir les cinq informations que j’ai mentionnées il y a quelques instants à propos de la VADA.

Je vais déposer une copie de cette lettre auprès du conseil pour être certaine que les informations requises sont bien notées. "

***

Hier soir, nouveau passage au conseil municipal où la greffière, Me Isabelle Sauvé me dit qu'il me faudra passer par l'accès à l'information pour obtenir l'entièreté des informations demandées sur la VADA. La ville gagne du temps, espère que le citoyen laissera tomber ou que l'instance de l'accès à l'information ne donnera pas l'accès aux informations souhaitées.

Aussi, voici comment le procès-verbal de la réunion du conseil du 4 avril résume mon intervention :

me Dauphinais demande de l’information concernant l’organisme VADA. Elle remetme
Madame Hélène Dauphinais


Mme Dauphinais demande de l’information concernant l’organisme VADA. Elle remet
en question le fait que VADA soit d’accord avec le logement complémentaire. Elle lit
un extrait de la lettre de l’organisme. La conseillère Fugère étant présidente de cet
organisme. Elle demande la liste des membres et plusieurs questions sur le
traitement de ce sujet par VADA. Elle remet en question la crédibilité de cet
organisme qui favoriserait un individu par rapport aux intérêts des aînés. Le conseil
doit défendre la position de tous les groupes de citoyens et non seulement le groupe
des aînés ou VADA. Elle suggère de ne pas aller au référendum et de revenir en
arrière sur ce règlement. Des abus pourraient se faire dans des quartiers. M

Dauphinais dépose le texte de son intervention afin que les éléments qu’elle a
soulevés soient vérifiés.

M. le président fait part de l’entrée en vigueur du règlement 648 prévue le 19 avril
prochain et du fait que le conseil prendra position le 18 concernant le référendum
dans les 3 zones visées. Il explique d’où vient l’organisme VADA. Les informations
demandées seront obtenues.

Le conseiller Brochu fait part des interventions qui ont fait suite à la consultation
publique dans l’arrondissement. Il précise la lecture du mémoire de VADA lors de la
séance d’information.

Gestionnaire responsable : Marie-France Delage

***

Comme vous le constaterez, il n'est fait nulle part mention du conflit d'intérêt soulevé lors de mon intervention.

En conclusion, on veut que les citoyens s'impliquent, mais seulement s'ils ne posent pas de questions trop dangeureuses. Et si c'est le cas, on leur mettra des bâtons dans les roues pour obtenir des réponses. Et les procès-verbaux retiendront seulement ce qui fait l'affaire des gens qui les rédigent. Question transparence, on repassera.

Impliquez-vous qu'ils disaient ... en autant que ce soit pour nous féliciter, auraient-ils dû ajouter.

DOSSIER C.M. 2011-7311-03